L'Ami du peuple. Tel est le surnom de Jean-Paul Marat, médecin, physicien et surtout homme politique et journaliste durant la Révolution française. Il doit ce surnom au journal du même nom qu'il publie dès les premiers temps de la Révolution. A travers ses articles, il se présente comme le défenseur des faibles et des opprimés, prenant position contre le colonialisme et l'esclavage. Cela jusqu'au 13 juillet 1793. Après lui avoir adressé plusieurs courriers et cherché à le rencontrer sans succès, Charlotte Corday réussira enfin à avoir l'entrevue qu'elle désirait. Marat, victime d'une maladie de peau et étant obligé de prendre des bains de souffre, recevra ce jour-là dans sa baignoire celle qui lui portera un coup de poignard fatal.

Suite à cet acte qui a choqué et marqué son époque, la jeune femme se retrouvera sur l'échafaud, présentant sa nuque à la guillotine. Alors que sa tête roule dans le panier d'osier, nul ne sait quels auraient pu être les mots échangés entre Marat et Corday. Et si les deux pouvaient se rencontrer à nouveau, que se diraient-ils ?

Dans J'ai tué Marat, les auteurs répondent brillamment à cette question. Le bourreau et sa victime se retrouvent dans les limbes, retraçant le cours d'un évènement célèbre de l'Histoire. Alors que Charlotte Corday va expliquer comment elle a mis au point son stratagème, Marat aura la possibilité de se défendre, ce qu'il n'a pu faire dans sa baignoire. Car en effet, l'idée ici n'est pas de raconter l'assassinat de Marat sous la forme d'un polar, mais de permettre à Charlotte Corday d'exposer ses motivations à sa victime, ce qu'elle n'a pu faire avant son geste. Face à elle, Marat pourra défendre sa vision de la Révolution et les raisons qui le poussèrent à envoyer via ses écrits des centaines de personnes à l'échafaud.

Indirectement, cette œuvre défend l'idée que l'Histoire ne se divise pas entre méchants et gentils. D'ailleurs, qui pourrai dire ici qui est quoi, entre un Jean-Paul Marat victime et délateur, et une Charlotte Corday idéaliste et criminelle ? L'un des tours de force de J'ai tué Marat est de sortir les deux protagonistes de leur figure de « personnages historiques » et de les humaniser, à travers un débat philosophique et historique des plus passionnants. Etait-il possible de renverser un régime monarchique et absolu sans violence ? La religion, et ses représentants ecclésiastiques, devaient-ils avoir une place dans cette nouvelle société que voulaient fonder les révolutionnaires ? Dans quelle mesure les riches et les modestes devaient être opposés en ces temps ? Les deux auteurs ne prennent pas position sur ces questions, rappelant que l'Histoire n'est pas figée.

Parallèlement, les dessins retranscrivent parfaitement l'époque. Le lecteur est baladé entre la province et le Paris du XVIIIème siècle à travers de très belles planches, tandis que les sentiments des personnages sont littéralement lisibles sur leurs visages. Enfin, on retrouve avec plaisir en BD la scène de la mort de Marat dans sa baignoire immortalisé par le peintre David dans un célèbre tableau.

Après J'ai tué François-Ferdinand, Archiduc d'Autriche, ou encore J'ai tué Philippe II de Macédoine, cette collection, chez Vent d'Ouest, s'enrichit d'un nouveau titre passionnant en retraçant l'Histoire d'une manière passionnante !

J'ai tué Marat
Scénariste: LF Bollée
Dessinateur: Olivier Martin
Tome 1 : disponible
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