« Put a knife in the neck of the pig-god promoted », en français enfonce un couteau dans le coup du dieu-cochon promu. Vous vous demandez d'où peut bien être extraite cette phrase ?!

Ce sont simplement les paroles d'une chanson de Reese Greenwood, chanteuse à mi-chemin entre Rihanna et Rage Against The Machine. L'artiste engagée s'exprime alors en pleine campagne présidentielle américaine opposant le démocrate Sam Duggins au républicain Kenneth Laramy. Or, très rapidement, on a déjà un aperçu du visage qu'aura l'Amérique 25 ans après ces élections : l'autorité policière sera incarnée par des hommes sans foi ni loi, tandis que les justes n'auront comme seuls choix de se plier à leur volonté ou rejoindre une résistance bien mince... Le point de départ de la plus grande dictature du monde ? L'assassinat de la femme du candidat républicain, retrouvée morte un poignard plantée dans la nuque, comme le suggéraient les paroles de la chanteuse Reese Greenwood.

Entre présent et futur, le lecteur est alors emmené à voir comment les Etats-Unis, qui se vante d'être la première démocratie au monde, ont sombré dans le chaos. On suivra alors Reese Greenwood, approchée par le démocrate Sam Duggins, qui s'éprend de sympathie pour elle, et la manière dont les deux tentent de s'opposer au discours ultra violent de Kenneth Laramy, violence qui découle directement de l'assassinat de sa femme. Cependant, le monde ne se divisant jamais entre bons et mauvais, le chemin menant l'Amérique à sa perte s'avérera très tortueux...

Le portrait dressé ici de l'Amérique se veut assez réaliste, et est servit en cela par des dessins de très grande qualité. L'expression des visages est particulièrement bien détaillée – notamment celle de Sam Duggins qui a des allures de bon psychopathe – tandis que le réalisme se retrouve également dans le choix des décors, des accessoires – les lunettes hypster du journaliste de MTV – ou la coupe punk-branchée de Reese Greenwood. Les propos tenus par les différents personnages vont dans ce sens, et s'inscrivent clairement dans l'actualité politique : les journalistes sont à l'affût du scoop, les stars dénoncent le système mais dînent avec les candidats, tandis que ces derniers mentent à leurs électeurs.

Ainsi, Evil Empire, tout comme Reese à travers les paroles de ses chansons qui émaillent les différents chapitres de la BD, est une œuvre engagée. Elle alerte le lecteur contre certaines dérives du pouvoir, sans pour autant épargner le peuple, dont une partie en prend aussi pour son grade. Rien d'étonnant dans une Amérique post-11 septembre.

Mais attention, Evil Empire n'est ni un manifeste politique, ni une oeuvre sérieuse à en mourir! C'est une BD d'anticipation trash, violente, et qui, à l'image de Reese, en a dans le pantalon. De plus, les nombreux rebondissements et les flash forward qui amènent le lecteur 25 ans dans le futur donne un rythme narratif particulièrement intéressant. Ainsi, le lecteur n'a qu'une envie, c'est savoir ce qui a pu amener l'Amérique dans un tel état de décrépitude. Et si vous aussi vous voulez savoir à quoi pourrait ressembler notre futur, n'hésitez pas à lire Evil Empire, aux éditions Glénat!

EVIL EMPIRE
Scénariste : Max Bernis
Dessinateur : Ransom Getty
Tome 1: disponible
Tome 2: prévu le 6 juillet 2016
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